Le groupe Électricité de France (EDF) a conclu un accord avec le fonds américain Apollo Global Management pour lever jusqu’à 4,5 milliards de livres sterling par le biais d’émissions obligataires non cotées. Cette levée de fonds permettra à EDF de sécuriser une partie importante du financement nécessaire au projet nucléaire britannique Hinkley Point C, situé dans la région du Somerset. L’accord porte sur trois tranches d’émission, dont la première tranche de 1,5 milliard de livres sera émise le 26 juin prochain. Les deux tranches suivantes pourront être sollicitées par EDF en 2026 et 2027 selon ses besoins.
Hausse continue des coûts du projet
Initialement évalué à environ 18 milliards de livres lors de son lancement en 2016, le coût global de Hinkley Point C atteint aujourd’hui entre 31 et 34 milliards de livres sterling. Cette révision s’explique principalement par des retards techniques répétés, mais aussi par une inflation marquée depuis 2015. Ramenée aux conditions économiques actuelles, l’estimation du coût total grimpe désormais à une fourchette comprise entre 41 et 46 milliards de livres sterling, soit environ 47,9 à 53,74 milliards d’euros. Le dépassement budgétaire suscite des inquiétudes accrues auprès des autorités financières et des actionnaires impliqués dans le projet.
Le projet Hinkley Point C consiste en la construction de deux réacteurs nucléaires de type Réacteur Pressurisé Européen (EPR). EDF est l’actionnaire majoritaire à hauteur de 72,6 %, tandis que le partenaire chinois, China General Nuclear Power Group (CGN), détient les 27,4 % restants. Depuis 2023, CGN a toutefois indiqué clairement qu’il ne participerait plus aux financements supplémentaires liés aux dépassements budgétaires. Cette position a poussé EDF à rechercher activement d’autres sources de financement pour couvrir ces surcoûts imprévus.
Inquiétudes politiques et financières
En avril, la présidente de la Commission des affaires économiques, Aurélie Trouvé, ainsi que Charles de Courson, rapporteur général du budget, avaient qualifié publiquement le projet Hinkley Point C de « gouffre financier ». Ils avaient exprimé leurs préoccupations concernant l’absence de consultation préalable du Parlement français sur le renouvellement des engagements financiers du groupe, désormais entièrement détenu par l’État français. La Cour des comptes française avait, quant à elle, appelé début 2025 à une clarification des risques liés au programme de réacteurs de type EPR avant tout nouvel investissement public majeur.
En parallèle, Marc Ferracci, ministre français de l’Énergie, avait invité le gouvernement britannique à prendre ses responsabilités financières concernant les surcoûts du projet. Cette prise de position intervenait dans un contexte de relations tendues liées à la sortie partielle du partenaire chinois CGN du financement initial. Le ministère français de l’Énergie avait rappelé que cette question serait abordée avec fermeté lors d’un sommet énergétique organisé à Londres, insistant sur la nécessité d’un équilibre dans la répartition des charges financières entre les différents partenaires.
L’accord avec Apollo Global Management représente une étape stratégique clé pour EDF dans la poursuite de son projet britannique, garantissant des liquidités immédiates et prévisibles sur trois ans. Il répond en partie aux préoccupations financières exprimées par les autorités et les régulateurs, tout en laissant ouvertes des questions sur l’avenir à long terme du financement du programme nucléaire européen.